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Gironde : qui veut encore la LGV ?
A la Une / Bordeaux / Publié le 27/10/2016 . Mis à jour à 08h23 par Bruno Béziat
Les projets d’extension vers le Pays basque espagnol et Toulouse ont du plomb dans l’aile. ©
Archives Guillaume BonnaudLes projets au sud de Bordeaux n’ont plus beaucoup de soutiens parmi les élus et encore moins chez les habitants concernés
Alors que la ligne grande vitesse (LGV) entre Paris et Bordeaux qui va mettre la Métropole à deux heures de la capitale se profile avec une ouverture en juillet 2017, les projets de prolongement de cette ligne au sud vers Toulouse et le Pays basque espagnol ont du plomb dans l'aile.
Lundi dernier, un projet de la délibération modificative du Conseil régional pour trouver les fond nécessaires à la poursuite de ce projet de Ligne Grande Vitesse - Grand Projet Ferroviaire du Sud-Ouest (LGV-GPSO) a été retiré par le président de région Alain Rousset, face à l'opposition radicale de ses alliés écologistes.
Quelques jours avant, le député socialiste du Sud-Gironde Gilles Savary a présenté, comme coauteur, un rapport sur la réforme ferroviaire, dont il est devenu un spécialiste. Il y souligne notamment les dérives financières de la LGV Tours-Bordeaux, l'endettement croissant de la SNCF et le retard pris dans l'amélioration des lignes régionales faute d'argent.
« Il est aujourd'hui unanimement admis que l'on a sacrifié notre réseau classique pour construire un réseau grande vitesse dont le modèle économique se dégrade. Ce n'est pas parce que l'on fait passer un TGV à 300 km/h devant la commune de Beautiran que ses habitants vont en bénéficier. Ils préféreraient avoir une amélioration du réseau régional qui permette de cadencer les trains », indique Gilles Savary.
Le député dénonce la dette abyssale de la SNCF, « alors qu'il faudrait faire un réseau structurant pour faire rouler des trains à 250 km/h sur la ligne existante plutôt que construire à grands frais une nouvelle ligne ». « On ne perdrait que 8 minutes pour aller au Pays basque pour un coût bien inférieur. » Mais pour lui, la priorité des priorités reste la restructuration de la ligne entre Langon et Bordeaux afin d'améliorer le service de proximité.
Pas d'argent du département
Cette position est aussi partagée par le président socialiste du Conseil départemental Jean-Luc Gleyze. Ce dernier prévient : « Pas un sou de financement pour un projet de LGV au sud alors que l'on nous retire nos compétences. » « Si je me place dans l'intérêt des Girondins, la question des lignes régulières, notamment la Bordeaux-Langon, est une vraie priorité », ajoute-t-il.
Même l'opposante d'Alain Rousset à la région et vice-présidente de la Métropole, Virginie Calmels (Les Républicains), est d'un enthousiasme très modéré. « Il ne faut pas enterrer le projet car Bordeaux ne doit pas être un cul-de-sac de la grande vitesse, donc ne pas obérer l'avenir notamment pour la liaison vers l'Espagne, mais la question du financement est essentielle. Or, aujourd'hui il n'y a pas de solution sur la table. »
Président de la Chambre de commerce et d'industrie régionale, Laurent Courbu défend cependant le projet au nom des entrepreneurs. « Nous avons besoin de connexion à terme avec Bilbao. Tout ce qui peut favoriser les échanges sera bon pour le département de la Gironde, la métropole bordelaise et ses entreprises. Se rapprocher d'une région aussi dynamique que le Pays basque espagnol est une chance. » L'une des rares voix qui soutient aujourd'hui ce projet GPSO, que les élus girondins regardent pour la plupart avec méfiance. D'autant que l'argent pour le financer n'existe pas.
Le Sud-Gironde reste mobilisé
Des portes de l’agglo bordelaise au cœur des Landes girondines, ils sont nombreux à s’opposer aux projets de lignes à grande vitesse Bordeaux-Dax et Bordeaux-Toulouse qui traverseront le Sud-Gironde. Ces objections ne se résument pas au syndrome Nimby, le « not in my backyard (1) » qui souhaiterait voir les tractopelles aller s’activer ailleurs. Elles contestent l’intérêt général de ces LGV.
Un point sur lequel se retrouvent des associations de défense de l’environnement, des viticulteurs des Graves, du Sauternais, des chasseurs, sylviculteurs, simples habitants ou encore des politiques. Le président du Département Jean-Luc Gleyze ou le député Gilles Savary sont passés, depuis quelques temps déjà, du côté des opposants.
Ce mouvement n’a pas été affecté par la Déclaration d’utilité publique (DUP) des lignes nouvelles, tombée en juin et attaquée dans la foulée devant le Conseil d’État. Six recours ont été déposés devant la plus haute juridiction administrative française. Tous à l’instruction, ils ne devraient pas être audiencés avant de longs mois.
Le temps des recours
Plusieurs associations, organismes viticoles et collectivités sud-girondines se sont associés à ces recours. C’est le cas de la Communauté de communes de Montesquieu qui réunit les treize communes du canton de La Brède, dont deux, Saint-Médard-d’Eyrans et Cadaujac, seraient coupées en deux par les aménagements des LGV.
« Ces lignes sont une aberration, tant financière qu’environnementale, insiste le président de cette collectivité, Christian Tamarelle. Au lieu de construire de telles infrastructures à la rentabilité plus qu’incertaine, il faut réaménager les lignes existantes pour offrir des TER dignes de ce nom. C’est de cela dont la population a besoin et c’est pour cela que nous restons déterminés. » Un argument partagé par les associations telle LGVEA, dans les Graves, l’une des plus actives avec LEA, dans les Landes girondines. Deux structures dont des militants figurent parmi les 140 personnes à avoir acheté des parcelles sur le tracé du projet, à Landiras, dans le but de freiner ses avancées.
« Nous sommes confiants, assure le président de LGVEA, Jean-Robert Thomas. Le modèle des LGV ne cesse d’être remis en cause. Il est épinglé par la cour des comptes et, encore récemment, par un rapport sénatorial. » Avec onze autres associations du Lot-et-Garonne, du Tarn-et-Garonne et de la Haute-Garonne, LGVEA a également attaqué les DUP sur les aménagements au sud de Bordeaux et au nord de Toulouse devant les tribunaux administratifs des deux capitales régionales. Des recours qui, eux aussi, mettront plusieurs mois avant d’être jugés.
Source Sud ouest : article du 27/10/16
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